Dans un jugement
publié jeudi 13 décembre 2018, le conseil de prud'hommes de Troyes a décidé de
passer outre le plafonnement des dommages et intérêts en cas de licenciement
abusif, prévu dans les ordonnances réformant le Code du travail.
C'est une
première et un coup porté aux ordonnances Pénicaud réformant
le Code du travail, en vigueur depuis septembre 2017. Dans un
jugement publié jeudi 13 décembre, le conseil de prud'hommes de Troyes a décidé
de passer outre le plafonnement des dommages et intérêts que les salariés
peuvent réclamer aux prud'hommes en cas de licenciement abusif. Selon lui, ce plafonnement
est contraire à la charte sociale européenne ainsi qu'à la convention de
l'Organisation internationale du travail (OIT). C'est une mesure phare des
ordonnances qui vise à offrir davantage de prévisibilité aux entreprises sur le
coût des licenciements et qui est aussi controversée car elle prive le juge de sa liberté souveraine d'interprétation.
En gros,
selon les ordonnances, les dommages et intérêts que peuvent percevoir les
salariés en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse sont désormais
plafonnés selon leur ancienneté. Et ils ne peuvent excéder 20 mois de salaire
brut. Ce qui signifie que les juges ne peuvent plus fixer le
montant des dommages et intérêts qu'ils souhaitent. Ce montant ne
doit pas être supérieur aux barèmes prévus par les ordonnances sauf en cas de
harcèlement, de discrimination ou encore pour violation des libertés
fondamentales (comme, par exemple, la liberté d'expression).
«Ces barèmes ne permettent pas d'être dissuasifs pour les
employeurs qui souhaiteraient licencier sans cause réelle et sérieuse un
salarié»
«Ce
plafonnement ne permet pas aux juges d'apprécier les situations individuelles
des salariés injustement licenciés dans leur globalité et de réparer de manière
juste le préjudice qu'ils ont subi», insistent les conseillers. En outre, «ces
barèmes ne permettent pas d'être dissuasifs pour les employeurs qui
souhaiteraient licencier sans cause réelle et sérieuse un salarié, précisent-ils.
Ces barèmes sécurisent davantage les fautifs que les victimes et sont donc
inéquitables».
Résultat
des courses: les conseillers ont décidé d'imposer à l'entreprise de verser au
salarié concerné 37.143,63 euros de dommages et intérêts (soit 9 mois de salaire
brut). S'ils avaient appliqué les barèmes fixés par les ordonnances, le montant
aurait été bien plus faible, d'environ 16.500 euros, selon les calculs de
Amélie d'Heilly, avocate associée chez SCM 5QB Avocats et membre du Bureau
d'AvoSial, syndicat des avocats d'entreprise.
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